Article par Jammes Audrey 2011

Pour mettre en place un système d‟innovation, qui fonctionne, soit pérenne et permette réellement le développement des innovations, une organisation a besoin de développer la confiance de ses collaborateurs en la hiérarchie, daccorder des formations, du temps et un droit à lerreur à ses collaborateurs. Les collaborateurs sont aussi plus à même de participer s‟ils visualisent leur place dans l‟organisation et ce qu‟ils peuvent lui apporter. Il peut être aussi bénéfique de donner envie aux collaborateurs de se développer et de développer leur propre organisation. La direction doit donc aussi leur offrir la possibilité de communiquer, verticalement mais aussi horizontalement et de permettre ainsi le partage didées. Il peut être préférable d‟impliquer les personnes dans la mise en place de leurs propres idées. Enfin, elle doit assurer une rapidité de réponse face aux propositions.

Un dispositif d‟intelligence collective favorise les conversations. Cela permet à chacun d‟apprendre à se connaître et à mieux comprendre le fonctionnement de lorganisation et le rôle de chacun. C‟est aussi par la conversation que les collaborateurs peuvent construire des projets et des stratégies ensemble. Enfin, le partage des idées et des émotions a un effet de catharsis, renforce les liens et permet finalement à chacun de reprendre espoir et de renouveler sa motivation, collectivement. Par ailleurs, l‟implantation d‟un tel système est censée démontrer une certaine ouverture de la hiérarchie, qui accepte qu‟elle n‟a pas toutes les réponses et que celles-ci se trouvent partout, en chacun de ses collaborateurs.

À partir de ces conclusions, on peut établir des liens entre innovation participative et intelligence collective. Un dispositif d‟intelligence collective est une réelle opportunité pour les collaborateurs de converser, dapprendre à se connaître et à se comprendre et donc à mieux visualiser leur place et leur rôle dans lorganisation, de leur donner envie de la développer et de leur donner la possibilité de communiquer, ce que nécessite un système d‟innovation participative. Des méthodes d‟intelligence collective telle que la Future Search Conference,world café, IA, théorie U, open space tecnology, art de la récolte, etc.. en particulier, offrent la possibilité aussi aux collaborateurs de construire ensemble et donc de partager leurs idées, ce que requiert un système d‟innovation participative. Enfin, la mise en place d‟un dispositif d‟intelligence collective favorise les regains d‟espoir et de motivation puisque les collaborateurs reprennent confiance en leur organisation et en leur hiérarchie. En effet, il s‟agit bien dune démonstration découte, dintérêt et douverture de la part de la hiérarchie que de mobiliser les collaborateurs sur leur temps de travail pour leur demander leurs avis et sentiments. Cela favorise également chez les collaborateurs leur volonté de communiquer, ensemble et avec leur hiérarchie. Or un système d‟innovation participative repose aussi sur la confiance, la fluidité et louverture des communications. Quant aux besoins de formation, de temps, de rapidité de réponse et de possibilité de participer à la mise en oeuvre pour les collaborateurs, ils seront facilités par une hiérarchie ouverte à la modification de ses politiques, de son organisation et qui modifiera aussi son discours.

La culture française, surtout celle des ministères, est très ancrée chez de nombreux collaborateurs, sur toute l‟échelle hiérarchique. Elle souffre d‟un certain scepticisme et de fortes habitudes organisationnelles, notamment dues à la sélection par concours de la plupart de ses collaborateurs, sélectionnés plus pour leurs connaissances techniques que pour leur savoir-faire et leur savoir-être. Puisqu’‟il est actuellement impossible de changer cette culture, il nous faut nous y adapter et trouver des solutions qui permettent à l‟administration d‟évoluer en douceur et donc de lintérieur. Il ne s‟agit pas d‟introduire de nouvelles règles et procédures mais plutôt de donner la possibilité à chacun de prendre la place quil se doit, celle dacteur actif et réceptif de son administration. Le développement de l‟intelligence collective permet en effet à chacun de mieux prendre sa place, de se sentir plus utile à son organisation mais aussi de sentir que cette organisation lui apporte beaucoup. Ainsi, mes recommandations s‟articulent sur deux fronts.

Implanter un dispositif d’intelligence collective petit à petit

Le front consiste à implanter un dispositif d‟intelligence collective d‟abord dans un service ou une direction, avec la méthode la plus approprié en fonction du besoin. Il pourrait être soutenu par un consultant professionnel de l‟intelligence collective. Pour être un succès, il faut toutefois s’assurer que la direction est vraiment en demande d’une telle méthode et est ouverte au changement. Si l‟expérience connaît du succès, il serait alors très bénéfique pour d‟autres services ou directions de réaliser les changements bénéfiques qui ont pu s‟opérer. Par exemple, des réunions déchange et de partage sur cette expérience pourraient être organisées en plus d‟un rapport de synthèse largement diffusé. En effet, les autres administrations pourraient prendre la décision de suivre ce bon exemple et d‟expérimenter ce type de dispositif d‟intelligence collective. La réussite de ces dispositifs sont ensuite très engageants pour le développement de système d‟innovation participative. Ces systèmes sont effectivement plus assurés d‟être menés et soutenus par des personnes réellement ouvertes à l‟innovation et au partage.

Développer la communication et les formations sur la notion de management puis sur l’innovation

Parallèlement, un deuxième front pourrait être mené, celui de développer la communication et loffre de formations sur le management, dans un premier temps, puis sur l‟innovation dans un second temps. La communication sur le management devrait permettre d’augmenter le nombre de personnes suivant les formations sur ce sujet. Elle devrait reposer sur l’importance de la gestion des hommes et sur l’importance des équipes dans l’atteinte des objectifs. Elle pourrait se faire par les médias habituels de l‟administration (intranet, newsletters…) et un séminaire de type Appreciative inquiry pourrait également être organisé pour donner l‟occasion aux différents managers de même niveau hiérarchique de communiquer ensemble sur leur rôle et sur ce qu‟ils pourraient faire pour mieux le remplir et s‟y sentir plus à l‟aise. Un tel événement pourrait sensibiliser plus fortement les managers quant à leur rôle et leur donnerait l‟opportunité d‟essayer de nouvelles pratiques de gestion qu‟ils auront découvertes par les discussions. À partir de là, il pourrait se développer une communauté de pratique entre ces managers de même niveau hiérarchique, leur permettant alors de se rencontrer à nouveau et d‟apprendre des uns des autres et de développer de nouvelles façons de réfléchir leur rôle et donc de le remplir. Après l‟organisation de ce premier séminaire, l‟administration pourrait ensuite communiquer plus fortement sur l‟innovation et particulièrement sur le besoin de l‟administration d‟être ouverte à de nouvelles manières dagir. C‟est actuellement un besoin réel de l‟administration française de faire des économies de temps et dargent, et d‟identifier notamment les pratiques administratives de l‟étranger qui peuvent être importées. Pour réaliser un tel projet d‟implantation et d‟expansion de l‟intelligence collective puis d‟innovation participative dans l‟administration du ministère, les directeurs généraux des différentes directions et le cabinet du ministre n‟ont besoin que d‟assumer leur besoin et le fait que les meilleures réponses se trouvent chez eux, chez leurs collaborateurs. Ensuite, la promotion de l’innovation chez les managers devrait nécessiter la modification des fiches de poste et des critères d’évaluation, en intégrant la curiosité et l’ouverture intellectuelles, la capacité à innover et à s’adapter au changement et en accordant des primes collectives, liées à l’innovation. À la suite des dispositifs d‟intelligence collective, les systèmes d‟innovation participative qui devraient être les plus utiles et pertinents sont ceux qui concernent un large spectre de collaborateurs, c‟est-à-dire les systèmes d‟innovation opérationnelle ou d‟innovation stratégique. En effet, ce sont des systèmes qui peuvent être décidés par la haute hiérarchie et qu‟un service ou une direction seule peut plus difficilement mettre en place.

MBA Management – 2009-2011
Comment l’intelligence collective
peut développer l’innovation participative,
aux ministères français de l’Économie, des Finances et de l’Industrie et
du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme
de l’Etat ?
Audrey Jammes
Directeur de recherche: Mario Cayer
Maître de stage: Françoise Waintrop